Planche / Bonnes vacances
V:.M:. Et vous tous mes Frères et mes Sœurs en vos grades et qualité.
Oublions pour un temps ce soir, les crises multiples, la morosité, le marasme politique et économique et surtout la violence comme nouvel outil d’expression. La période estivale qui s’annonce et les prochaines vacances appellent à un peu de légèreté.
J’ai donc choisi pour les dernières 5 minutes de symbolisme de la saison, d’évoquer une qualité que je pense relativement indispensable pour une vie gaie et dépourvue de monotonie : l’humour. Cette quasi-vertu n’est surement pas un frein à un comportement d’être humain responsable, fût-il franc-maçon ! L’humour participe de la notion de plaisir et de la bonne humeur. Car comme on le sait bien, le rire qu’il engendre est une chose sérieuse dont les bienfaits ne sont plus à démontrer. L’humour est spontané, presque inné et non réfléchi, ce qui en fait toute sa force.
De Rabelais qui dans l’avertissement en vers du Gargantua, proclame son intention d’écrire une œuvre franchement comique : « Mieux est de ris, que de larmes écrire, Pour ce que rire est le propre de l’homme.» à Desproges qui disait qu’on peut rire de tout, l’humour est partout dans l’histoire de nos vies. C’est un don subtil et merveilleux car il peut triompher dans les situations les plus délicates, désamorcer des conflits, et même être un exutoire à la souffrance. Et sans lui, imaginez qui pourrait nous sauver du ridicule…. C’est le complice de l’auto-dérision.
Quel bel exemple aussi que celui de Pierre Dac, qui composa cet extraordinaire rituel en argot ! ou les pensées d’Alfred Jarry comme celle-ci : « l’eau, liquide si impur, qu’une seule goutte suffit pour troubler l’absinthe. » Et celle d’Oscar Wilde que je préfère : « l’humour est la politesse du désespoir ».
Extravagant, facétieux parfois incongru, mais jamais vulgaire, l’humour est toujours brillant, de haute qualité, aussi osé soit-il. Il nous permet de prendre de la distance sur les êtres et les choses pour leur donner leur juste poids et leur juste place. Quoi de plus agréable quand dans le sérieux de nos Travaux, un trait d’humour vient dessiner un sourire sur nos visages et illumine nos cœurs. N’est-ce pas V:.M:. ? L’humour, arme de séduction massive est un art car il vient nous chatouiller l’âme avec des idées, des mots, des sons ou des images et déclenchent des émotions ou des souvenirs qui nous aident à vivre.
Mes Frères et mes Sœurs, comme je l’ai dit au début de cet exercice, l’humour introduit la notion de plaisir…, et quand le plaisir est présent, le bonheur n’est pas loin. Alors en guise de conclusion, je ne résiste pas au plaisir « gourmand » de partager avec vous un poème maçonnique écrit par une Sœur dont je vous laisse apprécier la saveur : Il s’intitule : LE MAITRE ET SON EGO
Un Maitre Maçon sur sa colonne somnolait.
Il écoutait une planche qu’un apprenti lisait.
De symbole encore il était question
Et il en avait entendu de bien des façons.
Ses tempes blanches et son tablier défraichi
En disait long sur son expérience de ces lieux ci.
Tout ce qu’on pouvait lui conter
Il les avait entendues en ses vertes années.
Rien ne pouvait le surprendre
Tant il était sûr de ne rien apprendre.
La douce mélopée de l’orateur
Le morfondait dans sa torpeur.
Que pouvait-on lui faire découvrir
Lui qui de tous les Rituels à parcourir
Avait retenu à la ligne près
La moindre phrase à réciter.
Du haut de sa colonne de certitude
Il contemplait négligemment la multitude.
Il n’avait plus à comprendre le Symbole
Étant à ses yeux lui, tout un Symbole.
Quant à commenter la planche de ses Frères
Une seule réponse de lui à faire
«Mon Frère, c’était bien documenté »
Lui qui n’avait rien écouté.
Et quand dans la magie d’un soir
Notre Maitre devient l’orateur de l’auditoire
Point question de rêvasser
De crainte de le froisser
Et de le voir tout ulcéré
D’un si grand manque de Fraternité.
Pourtant selon le principe de l’arroseur arrosé
Il en avait eu présentement la leçon au complet.
Qu’importe de tout connaitre
Si c’est pour s’éloigner des êtres.
Le partage est à double sens
C’est là la première des sciences
Maitres, Compagnons, Apprentis
Le chemin n’est jamais totalement fini.
Et qu’il faut bien se garder
D’une trop grande supériorité.
L’humilité est de mise
C’est la leçon apprise.
Notre Maitre tout à son égo
En a fait l’expérience tout de go.
Le dignitaire ne doit pas faire l’homme
Mais l’homme doit faire le dignitaire
C’est la toute une leçon en somme.
Dont nous devons apprendre les mystères.
Qu’importe de venir en Loge
Si personne ne s’interroge
À savoir que notre premier devoir
Est d’être un guide pour les autres dans le noir.
J’ai dit.